Peut-on parler de guerre à Gaza ?

Publié le par MASHIMANGO

Tout le monde le sait : le système international est anarchique. Non seulement il est caractérisé par une grande pluralité des Etats, mais aussi n’a pas d’autorité supérieure capable d’imposer efficacement et équitablement le respect des règles du droit international. La situation qui prévaut à Gaza et en Cisjordanie illustre avec éloquence cette acception.

La guerre est l’une des principales activités publiques internationales. Malgré le principe de l’interdiction formelle de la guerre qui se dégage de la Charte de l’ONU, les Etats sont toujours préoccupés par le souci de préparer la guerre. Mais qu’entendons-nous par une guerre ? C’est un duel entre deux ou plusieurs belligérants, la mise en œuvre de l’hostilité collective par l’emploi de la force armée et qui se traduit par le combat. Comme le dit Carl Von Clausewitz, c’est une forme rationnalisée, organisée et disciplinée de la violence ou de la rupture de la paix comme moyen subordonnée à une fin politique.

Raison pour laquelle elle est réglementée quant à ses buts, moyens, méthodes et acteurs. C’est le principal objet du droit de la guerre qui, par le biais du  Jus in Bello et Jus ad Bellum, prescrit les conditions de licéité et de légalité du recours et l’usage de la force armée. Ce droit est plus ancien que la guerre elle-même. Il remonte dans l’histoire. En 2000 avant l’ère chrétienne, Hammourabi n'avait-il pas disposé dans son Code que le fort ne doit pas opprimer le faible? Ne retrouvons pas également le Jus in Bello dans les civilisations indienne (Mâhâbharata), nippone (Bushido), dans l’Islam, le Christianisme, au Moyen-Âge avec la chevalerie et dans les civilisations africaines?
Il faut tout de même souligner que le droit des conflits armés a connu son apogée à partir de 1863 lorsqu’Henri Dunant, dans « Souvenirs de Solferino », préconisa la création des équipes sanitaires neutres et d’une organisation permanente (la Croix-Rouge) et Francis Lieber confectionna le premier manuel qui regroupe tous les moyens et méthodes de la guerre, lequel manuel est à l’origine des Conventions de La Haye (18/10/1907).

Le droit des conflits armés est donc l’ensemble des conventions internationales qui organisent la façon mutuelle dont les Etats utilisent les forces armées, ainsi que la situation des Etats tiers aux conflits armés. Cette initiative a été légitimée dès 1864. Elle invoque les exigences humanitaires qu’elle associe et soumet aux nécessités politico-militaires.

Alors, que stipule le Jus in Bello ? Globalement, il postule que le belligérant ne doit pas infliger à son adversaire des dommages inutiles et excessifs au but de la guerre : vaincre l’ennemi (attention : on souligne bien vaincre l’ennemi et non son extermination), affaiblir sa puissance militaire en épargnant le plus possible les non-belligérants et les non-combattants et en évitant de causer des morts superflues, inutiles aux combattants. De ce point de vue, on peut augurer que le Jus in Bello limite la guerre en intensité et, par conséquent, il permet d’éviter la guerre totale. Ce qui est différent de la situation actuelle à Gaza où l’on assiste à un carnage, déchainement de la violence, une violence brute caractérisée par des bombardements indiscriminés des objectifs et massacre des enfants et des femmes.

Certes, certaines actions armées – comme les représailles – dérogent aux règles applicables au Jus in Bello à la suite de la commission par l’adversaire d’actions illicites. Exclusivement dissuasives,  les actions de représailles doivent remplir les conditions suivantes :

- Primo, la décision doit être prise lorsqu’il n’y a pas d’autres solutions.

- Deuxio, l’exécution doit être précédée d’un avertissement à l’adversaire pour qu’il cesse sa conduite.

- Tertio, et c’est le plus important, elles doivent être proportionnelles à la violation commise par l’adversaire et identique ( ?).

- Quarto, l’arrêt immédiat de représailles lorsque l’adversaire met fin à ses actions illicites.

 

Ces règles et bien d’autres montrent que les belligérants n’ont pas un droit illimité quant aux moyens de nuire l’ennemi (Article 35 du Protocole additionnel aux Conventions de Genève relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux, Protocole I). Les belligérants doivent également obéir le principe de distinction des combattants et des non combattants, des objectifs militaires et non militaires.

Les articles 13, 14, 15, 16, 17 et 18 du Protocole II livrent une liste d’interdictions dans la conduite de la guerre. A cela s’ajoute le principe de précaution qui oblige les belligérants à vérifier si les objectifs visés ont caractère militaire et à prendre toutes les mesures pour éviter et réduire les pertes et dommages civils. Donc, à s’abstenir à lancer des attaques qui causent des dommages civils regrettables.

Aucun de ce principe n’est respecté par l’Etat d’Israël qui viole, impunément le principe de nécessité et le principe de proportionnalité qui imposent la limite d’usage d’armes afin d’éviter les dommages collatéraux excessifs et inutiles par rapport à l’avantage militaire attendu. 

De ce fait, on ne peut pas parler de guerre à Gaza pour des raisons suivantes:
1. Les considérations morales  (humanité et honneur) qui empêchent la guerre à se hisser dans la barbarie sont bafouées par Israël,
2. P
ar ses bombardements indiscriminés, Israël se livre à une destruction « gratuite et punitive » de Gaza au mépris de tous les principes de droit international humanitaire, de droits de l'homme et de droit des conflits armés.
3. Il
inflige aux Palestiniens de Gaza des atrocités excessives et des cruautés. 
Tout bien considéré, ce qui se passe à Gaza c'est un
massacre, un crime de guerre. 
Reste à savoir si ces crimes resteront indéfiniment impunis. D’où la réprobation de l’opinion publique internationale.

 

 

 

 

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