Copenhague : 12 jours pour sauver la planète !
Depuis lundi se tient à Copenhague (Danemark), le Sommet de Chefs d’Etat et de Gouvernements du monde entier dénommé de « Copenhague ». Son objectif est de définir un nouveau cadre juridique international (un traité qui pourrait être signé en 2010) pour poursuivre le chantier de réduction de GES (gaz à effet de serre), entamé par le Protocole de Kyoto signé en 1998 et mis en route en 2005, lequel protocole expire en 2012. Sur ce point, Ban Ki-Moon, le SG de l’ONU est optimiste : « je m’attends à un accord qui sera effectif immédiatement », dit – il. Mais, sans être pessimiste ni sévère, je pense que, comme l’a bien dit Koffi Annan, cité par J.C. Buhrer et C.B. Levenson (2003), « les Nations Unies ne s’occupent pas de toutes les crises dont les gens à travers le monde estiment qu’elles devraient s’occuper ».
- La planète serait-elle en danger ? « La maison brûle-t-elle », comme le dirait Jacques Chirac ? Pas certainement. Une évolution ? Bien évidemment. Mais suivons le déroulement des événements pour se faire une idée. Il faut rappeler que trois points sont au cœur du débat à Copenhague, à savoir :
1. La responsabilité des pays les plus riches (les pays les plus industrialisés), gros émetteurs de GES.
2. La limitation des émissions par les pays émergents (à croissance rapide) comme la Chine, le Brésil et l’Inde.
3. L’accompagnement des pays en développement (pour ne pas dire les pays soumis à la pauvreté), pays poubelles de tous les déchets toxiques et, de ce fait, premières victimes du réchauffement climatique dû à la détérioration environnementale.
Ce Sommet constitue « les espoirs pour l’humanité », a lancé le Premier Danois dans son allocution d’ouverture. Ses engagements sont ambitieux :
- la réduction à hauteur de 50% des émissions GES à l’horizon 2050,
- l’aide à l’adaptation des pays vulnérables,
- la protection de la forêt qui capte le CO2.
Pour suivre les choses sérieuses (les discussions techniques, j’allais dire) qui commençaient mardi, je me suis réapproprié de la télécommande : de France 2 à Canal +, en passant par LCI, i Télé, BFM TV, France 24, Euronews, CNN, BBC News… je ne fais que zapper pour essayer de flirter ce qui va ressortir des discussions de 15 000 délégués réunis en groupes resserrés au Bella Center. J’ai même loupé les matchs de Champions’ league. Mais je n’ai pas à le regretter parce que, comme dirait le successeur d’Eric Gerets, Didier Deschamps : « les qualifications ont respecté la logique des choses », cette logique capitaliste qui fait que les gros poissons bouffent les petits.
A entendre cela, j’ai peur que « Copenhague » ne se transforme en Conférence de Berlin de 1885 qui a morcelé l’Afrique selon les zones d’influences. D’où la révolte de Lumumba Stanislaus Di-Aping, président du G77 (130 pays en dévbeloppement) : « Nous n’accepterons pas un accord qui condamne 80% de la population à plus de souffrance et d’injustice » et d’Angelica Navarro, négociatrice de la Bolivie. Celle-ci constate que le texte proposé semble « être rédigé dans l’intérêt des pays industrialisés ». « Copenhague » serait-il un spectacle où les riches habillés en vert s’unissent, non pas pour sauvegarder le monde, mais pour gagner davantage des fortunes ? Même si je ne suis pas à mesure de le confirmer actuellement, je réalise au fil des jours que mon inquiétude est malheureusement fondée. Comment ne pas douter lorsque seuls 2 milliards d’euros sont promises par l’UE pour quelques années alors que le chiffre total de ce que les 27 de l’Union ont donné aux banques pour conjurer la crise avoisine 1 000 milliards d’euros ! Avec ce comportement, je jure que « Copenhague » risque de devenir un cirque de diversion où vont se faire des grandes déclarations vertes pendant que la crise continue de ravager.
En effet, je me demande si « Copenhague » n’est pas la consécration déguisée du « capitalisme vert » sur lequel va d’ailleurs se fonder l’idée de la « taxe carbone », laquelle taxe que l’on va imposer aux pauvres alors que 96% des émissions de GES de l’industrie sont exonérés, sous prétexte d’éviter les « fuites de carbone » (j’allais dire les « délocalisations) ! Franchement, on n’est pas obligé d’être « Verts » ou porter la veste écolo pour comprendre qu’une économie non carbonée n’a pas besoin de ce genre de taxe inégale qui s’ajoute à d’autres mesures injustes et supplices sociales actuelles que les « riches » de ce monde infligent aux « petits ».
C’est pourquoi nous estimons obligatoire de modifier mécaniquement nos modes de vie et nous adapter à l’environnement. Et c’est avec ou sans « Copenhague » qui, finalement, est comme d’autres Conférences et Sommets internationaux : ces montagnes qui accouchent des souris. Pourquoi dis-je cela ?
1. Parce que le virus (le capitalisme) qui ronge les « mauvais élèves » (les élèves de mauvaise foi) est toujours présent. Comme l’avait dit l’ancien locataire de la Maison Blanche, Georges Walker Bush : « le mode de vie américain n’est pas négociable » !
2. Parce que les « Grands » de ce monde roulent avec le frein à main. Le quotidien L’Humanité n° 20247 du 4 décembre l’illustre en ces termes : « Alors que son pays est responsable à lui seul d’un quart des émissions mondiales et caracole en tête de classement par habitant, le président américain ne concède qu’un petit 4% de réduction par rapport à 1990. L’UE annonce un objectif de 20%, soit 5% de moins que le minimum préconisé par le GIEC, mais surtout un doute sérieux plane sur la capacité du Vieux Continent à remplir ses engagements. (…). La seule bonne nouvelle vient de la Chine et du Brésil qui veulent réduire son intensité carbone de 40% à 45% de ses émissions.» (p. 10).
3. Parce que les débats qui s’organisent sont entachés des discours électoralistes et publicitaires qui surfent sur l’émotion produit par les grands films, le choc des mots, le poids des photos, la misère… mais qui, en réalité, servent les intérêts des plus puissants.
Reconnaissant que je ne suis pas « écologiquement correct », nous considérons que « Copenhague » est un forum de négociation des conditions d’un « marché vert », c’est-à-dire une nouvelle occasion de se livrer à un exercice de « diplomatie verte », car comme l’écrit le journaliste Hervé Kempf : « pour sauver la planète, sortez du capitalisme » (Seuil, 2009). Là d’où je viens, ce n’est pas l’avenir qui est préoccupant, c’est aujourd’hui et maintenant : c’est donc une question de survie de l’humanité. Comme le dit Sylvie Pierron : « Devant l’enjeu de partager les ressources auxquelles 1 humain sur 5 n’a pas accès, devant l’urgence de l’assèchement, de la désertification croissante d’un côté et de la fonte des calottes glaciaires de l’autre, devant les conflits armés pour la maîtrise de l’eau, devant la privatisation croissante [souvent sauvage] de l’exploitation hydraulique : one ne peut qu’être en colère face aux faibles déclarations d’intention prises toutes les 3 ans et si peu appliquées. (…). Voilà un sujet qui mérite un véritable plan de bataille, une organisation internationale, du leadership, des milliards de dollars et d’euros et… des actes ! Voilà qui exige une mondialisation des solutions, une organisation des Nations pour préserver la ressource planétaire, en quantité et en qualité, et veiller à sa juste valeur répartition. (…). La bataille de l’eau commence au plus près de nos territoires : l’adduction, l’assainissement… n’existent pas sans le savoir faire des collectivités. Faute de peser efficacement sur les décisions politiques mondiales, qui demanderaient surtout une nouvelle conception de la coopération, du co-développement et du partage des richesses, un long savoir faire, depuis les romains, et des moyens financiers nous permettent au moins d’aider Madagascar, le Burkina, le Mali à améliorer leur réseau. Ces pays ont simplement besoin de toute l’aide possible ici et maintenant et il n’est pas question bien sûr d’attendre un monde plus juste pour supprimer leurs problèmes. Heureusement, de nombreuses collectivités locales prennent toute leur responsabilité dans la solidarité internationale, les associations et ONG agissent ; mais à ce titre, ils doivent avoir leur mot à dire sur la source des injustices ». Alors, en attendant la fin du Sommet, je laisse Sylvie Pierron conclure: « Je voudrais lancer pour conclure un appel à tous mes collègues ici, à tous leurs Partis politiques pour que nous soyons tous d’accord, sur un sujet aussi grave dont dépend l’équilibre de notre planète et la survie de millions d’êtres humains, pour peser sur les causes du problème. Mettre en commun les ressources – comme d’autres ressources essentielles – ce n’est justement pas traiter l’eau comme on a traité le pétrole et le gaz : comme une marchandise et un moyen de chantage. Pour garantir, préserver et distribuer équitablement l’eau, selon les besoins des gens, des bêtes, des terres agricoles et sauvages, il n’y a pas d’autres moyens que de la déclarer “Bien commun de l’humanité” et de la gérer au-delà des intérêts commerciaux : il n’y a pas d’autre moyen désintéressé que le Service Public. Parce que si, au contraire, nous sommes d’accord avec la marchandisation de toute chose et de tout service érigée comme règle de vie commune en Europe et dans le monde, on peut toujours causer ! Si on approuve un système qui fait dans le monde depuis des décennies plus de morts de soif, de faim, de dysenterie, de choléra et de victimes des guerres pour la maîtrise de l’eau… qu’aucun autre conflit historique, nos Fonds locaux de solidarité pour l’eau restent une goutte d’eau dans la mer ». Cette conclusion est partagée par Nawel Bab-Hamed en ces termes :« Ces préoccupations sont l’affaire de tous et démontrent l’importance de considérer le transport non pas comme une marchandise ou un bien commercial, mais bien comme un service public. Pour cela, il ne faut pas céder aux sirènes bruxelloises - soumises à la folie du libéralisme de l’AGCS de l’OMC – qui considèrent notre intérêt public et nos droits intrinsèques comme de simples marchandises à rentabiliser ». Eh bien, si j’ai bien compris ces deux conseillères communautaires de Grand Lyon, il n’y a pas de développement durable sans services publics de transport, de l’eau, de l’énergie, etc. Et si les pays riches ne sont pas bons élèves, c’est tout simplement à cause de l’impasse libérale dans laquelle ils se sont enfermés.